Jean-Luc Nancy – Mascarons de Macron

Sacré Jean-Luc Nancy.

Ce livre, l’avant dernier de son vivant, il a écrit avec beaucoup d’humour. De quoi s’agit-il ?  Il dresse en portrait de Emmanuel Macron par des mots. A chacun de ces mots il écrit ses réflexions, la plupart critiques, mais pas toutes. A la fin de chaque réflexion, il imagine un mascaron.

C’est quoi un mascaron ? C’est une figure sculptée en bas-relief ou en ronde-bosse, le plus souvent au sommet de l’arc d’une porte ou d’une fenêtre (on apprend des mots…).

A la première vue, le titre donne l’impression qu’il s’agit d’un écrit à charge, voire pire, mais pas tant que ça. Jean-Luc Nancy est resté lucide jusqu’à la fin.

Les mascarons

  • Le jeune – Le mascaron de ce portail reproduit un portrait de jeune homme songeur peint par Lorenzo Lotto
  • Self-Fils – Ici le mascaron figure un zymophilus qui est un des organismes procaryotes dont le matériel génétique n’est pas séparé du reste de la cellule, laquelle se reproduit elle-même en se divisant.
  • Phronésis – Le mascaron de cette entrée montre Loki – ou Loge – dieu nordique de la malice.
  • Futur – Ici le mascaron porte une image de Nostradamus.
  • Mission -On voit au mascaron la tête du missionnaire de Tintin au Congo.
  • Gilets jaunes -Vous voyez ici, bien sûr, un gilet jaune en guise de mascaron.
  • Complot -Le mascaron offre l’allégorie de la mondialisation : une mappemonde sur un bilboquet.
  • Banquier – Mascaron : un écu rouge (rot-schild)
  • Volonté – On place ici en mascaron la figure de l’Allégorie de la Volonté par Philippe de Champaigne.
  • Travail libéré – Mascaron : faucille, marteau et guitare.
  • Luis XVI – Un Janus fait ici le mascaron.
  • Algorithme – Le mascaron affiche les logos mêlés des langages Java, Python, C++, Javascript et d’autres ad libitum.
  • Passion – L’image de tête sur YouTube du film de Omar Dagnon, Le Piège des passions, fera un bon mascaron.
  • Anthropocène  – Mascaron : la tête de l’autre homme (celui de Néanderthal).
  • Macroion – Le pénultime mascaron présente le schéma “ionic bond in NaCl” (chlorure de sodium).
  • Panique – Le dieu Pan – celui dont Plutarque coryait avoir appris la mort – orne le dernier mascaron.
  • État – Mascaron : une couronne posée de travers sur une tête endormie que survole un Cupidon.
  • Macronvirus – Mascaron : un virus coiffé du bonnet phrygien.
  • Délibération – Voyez en mascaron les champs élyséens.
    Transformés en chantier pour les maduséens.
  • En marche – Le mascaron montre un avion muni de pieds. Ou l’inverse.
  • Symptôme – Mascaronez ici la chrysalide
    D’un papillon posé sur un royal préside.
  • 5GCOVID196 – Et pour cette infigurable figure il n’y a point de mascaron.

Citations

(p. 33)

Macron est une figure de proue du complot mondial ourdi par ce qu’on nomme le néolibéralisme. Il complote pour faire entrer les Français – et d’autres Européens dans une manœuvre de mise du pays à la disposition de la machine. Cela n’exclut pas, au contraire, qu’il cherche à faire de l’Europe une forteresse protégée des manœuvres des tout-puissants que sont les États-Unis et la Chine. Toutefois le complot est mondial. Tous y prennent part selon leurs capacités. Il y a déjà un certain temps que nous com-pelotons (c’est une possible étymologie) en nouant et en dénouant les pelotes des ficelles de nos commerces, de nos communications de nos réseaux et télé-conférences.

Bien entendu il n’y a pas de complot. Le complot relève d’une paresse intellectuelle face à la complexité. …

(p. 35)

Très vite on l’a caricaturé en banquier juif par référence à son emploi chez Rothschild puisque les juifs sont au cœur du complot mondial. Ce qui prouve qu’il y a toujours de sombres crétins qui lisent les “Protocoles des sages de Sion”.

(p.39)

Les gilets jaunes s’identifient sur le modèle du peuple souverain bien que paradoxalement ils en appellent à l’État comme à l’autre autocrate chargé d’exécuter leur volonté. Ils devraient sur ce point se méfier d’eux-mêmes.

Quatrième de couverture

Alors qu’il est coutume de démasquer les hommes et les femmes politiques, Emmanuel Macron déjoue cette entreprise. Il n’est pas un masque et il n’en porte pas non plus. Plutôt cisèle-t-il aux frontons de nos institutions une série de mascarons qui présentent toutes les figures d’un registre symbolique, mythologique ou idéologique.

Nous allons parcourir les avenues, les couloirs et les escaliers régulièrement surmontés de ces ornements expressifs. Comme les dieux, les vertus, les monstres ou les passions du temps jadis, ils portent des noms. Au demeurant ils ne sont rien d’autre que des figures divines, vertueuses, monstrueuses ou passionnées ; liste qu’on pourra prolonger à loisir.