Fred Kupferman – Le procès de Vichy : Pucheu, Pétain, Laval

Il s’agit, en fait, des trois procès les plus importants concernant les dignitaires du régime de Vichy.

Ce sont trois procès. Après une rapide explication sur le besoin de l’épuration (il y a d’autres livres plus complets sur le sujet), on a le récit des trois procès. Chaque procès est décrit par une introduction sur le contexte et la préparation de l’inculpé, suivi du récit du déroulement du procès.

Pierre Pucheu, c’est un cas à part. Il ne fait pas partie des plus gros criminels du régime de Vichy. Pierre Pucheu a été secrétaire de l’Industrie, quand il a beaucoup collaboré avec les Allemands, puis Ministre de l’Intérieur. En plus d’antisémite il était fortement anticommuniste et lors d’un acte de représailles allemand il privilégie la sélection de individus communistes à être fusillés. Il quitte le gouvernement en avril 1942, lors du retour de Laval. Il part en Algérie mai 1943 et est jugé en mars 1944, condamné il est exécuté peu après. Cela, avant même le débarquement en Normandie.

Le procès du Maréchal Pétain se déroule en août 1944. Il décidé de ne rien dire pendant le procès, estimant que la Cour n’était pas habilité à le juger. Défendu par trois avocats dont le meilleur a sûrement été Me. Isorni, que l’on retrouve dans d’autres procès comme avocat de la défense. Pétain a été condamné à mort mais le jury a, considérant son âge, estimé que la peine ne devrait pas être exécutée. Quelques jours après la décision, la peine a été commuée en prison à vie. Il finira sa vie à l’Ile de Yeu.

Le cas Laval est plus spectaculaire. Laval décide de se défendre tout seul. Devant l’intransigeance de l’accusé, les avocats déclinent sa défense. Laval décide de ne pas rejeter les jurés, dont la plupart sont des communistes. Il tutoie les jurés, insulte les magistrats disant que l’enquête avait été bâclée. Finalement le procès se déroule sans Laval et sans ses avocats. Laval est condamné à mort. Le jour de son exécution, au moins où les gardiens viennent le chercher, il avale une capsule de cyanure. Mais manque de chance, il n’avale que la moitié. Après plusieurs lavages d’estomac il est remis en état de vie et emmené au poteau pour être fusillé. Il demande aux exécuteurs de bien viser le cœur. Après l’exécution l’officier chargé de lui donner le coup de grâce constate que son visage est complètement défiguré.

C’est un livre court mais dense. Très intéressant pour avoir une idée du processus les plus emblématiques des dignitaires du régime de Vichy.

Citations

(p. 189)

En face de lui, des soldats de l’infanterie coloniale, portant curieusement des casques anglais : l’armée française de 1945 n’est pas bien riche. Pierre Laval a réussi à se maîtriser. Calme, plus serein que les témoins tenus d’assister à ses derniers moments. Il cherche du regard de Mornet qui se cache : “Je veux parler aux magistrats; Ils sont coupables d’un des plus grands crimes de l’Histoire. Je meurs pour avoir trop aimé mon pays.”

L’aumônier de Fresnes lui tend un crucifix, les avocats l’embrassent, veulent s’éloigner il les fait revenir: “Je veux que mon dernier regard soit pour vous.”

Adossé au poteau, il appelle l’officier: “Je ne voudrais pas être tué salement. Faites viser au coeur.”

Un dernier mot pour les soldats: “Vous êtes complices d’un des plus grands crimes de l’Histoire. Je ne vous en veux pas.”

Une rafale, Laval tombe. L’officier s’approche pour le coup de grâce. Il n’a pas tenu parole. L’Auvergnat est complètement défiguré.

Quatrième de couverture

Pierre Pucheu, ministre de l’Intérieur, le bourreau de Châteaubriant, qui ne renie rien de ses convictions et organise le cérémonial de sa propre exécution, le 20 mars 1944.

Philippe Pétain, revenu de Sigmaringen pour la grande explication et qui s’enferme dans un silence plus troublant que tous les discours, condamné à mort le 15 août 1945, peine commuée en réclusion à perpétuité par le général de Gaulle.

Pierre Laval, promis au poteau car son nom est lié au STO, à la terreur milicienne, à la livraison des enfants juifs, au souhait exprimé de la ” victoire de l’Allemagne “, qui croit pouvoir se justifi er et qui sera exécuté à l’aube du 15 octobre 1945.

Autour de l’enceinte où on les juge, un peuple divisé, les uns réclamant une justice exemplaire, voire expéditive, les autres rêvant d’une impossible réconciliation.

Il revient à l’historien d’apprécier l’attitude des coupables et des épurateurs. Fred Kupferman met ainsi en perspective les procès dans leur cadre historique. ” Une enquête passionnante qui réunit intelligemment en peu de pages les pièces d’un dossier compliqué ” (Le Magazine littéraire).