Bertrand Russell – De la fumisterie intellectuelle

Petit livre intéressant – moins de 100 pages – écrit pendant une période de relative oisiveté : il a été obligé de rester aux États Unis pendant la deuxième grande guerre.

Dans ce petit livre, le logicien Bertrand Russell s’applique à déconstruire les mythes, croyances, les superstitions, les généralisations, … communément acceptés comme des vérités indiscutables.

Le mot “fumisterie” dans le titre donne le ton. C’est avec beaucoup d’humour “british” décapant qu’il se livre à l’exercice, sans se priver de tourner au ridicule les thèmes abordés.

C’est un livre qui se lit très facilement et, vu la quantité de thèmes abordés (un concentré en peu de pages), on peut le lire et relire. On découvrira des nouvelles raisons pour se marrer.

Citations

(p. 30)

Saint Thomas d’Aquin, le philosophe officiel de l’Église catholique, s’est longuement interrogé sur ce problème très grave [la résurrection] dont je crains qu’il n’ait pété négligé par les théologiens modernes. Prenons le cas d’un cannibale qui ne serait nourrit que de chair humaine et dont les parents auraient suivi le même régime. Chaque particule de son corps appartient donc en droit à quelqu’un d’autre. Mais, à supposer que les corps cannibalisés ne soient pas mutilés ad vitam æternam, quelle substance restera-t-il aux cannibales ? Comment les faire rôtir en enfer, si toute leur matière corporelle s’est restituée à ses propriétaires légitimes ? C’est là une question troublante, comme l’avait bien compris le docteur angélique.

(p. 30)

A ce propos [la résurrection] les orthodoxes invoquent contre la crémation une objection bien étrange, laissant à penser qu’ils sous-estiment l’omnipotence divine. Ils arguent en effet qu’il sera plus difficile à Dieu de recomposer un corps incinéré qu’un corps putréfié. Certes, il serait laborieux de récupérer les particules dispersées dans l’atmosphère et d’inverser le processus chimique de la combustion, mais n’est-il pas blasphématoire de supposer que cette opération soit impossible à Dieu ? Cette objection à la crémation me semble tout à fait hérétique. Mais je doute que les orthodoxes fassent grand cas de mon opinion.

Quatrième de couverture

Les sornettes que l’État est capable de nous faire avaler sont sans limite. Donnez-moi une armée digne de ce nom, donnez-moi les moyens de lui offrir un salaire plus généreux et une nourriture plus abondante que la moyenne, et je vous garantis qu’en l’espace de trente ans je me débrouillerai pour faire croire à la majorité de la population que deux et deux font trois, que l’eau gèle à 1à0 degrés et qu’elle entre en ébullition au dessous de zéro, ou n’importe quelle autre fadaise susceptible de servir les intérêts de l’État.