Richard Malka – Traité sur l’intolérance

Richard Malka est avocat. Lors du procès de l’attentat contre Charlie Hebdo en 2015, il a représenté le journal. Ce livre est la transcription de sa plaidoirie.

Il s’agit d’une plaidoirie contre l’intolérance religieuse au blasphème. Il est, bien sûr, question des islamistes radicaux mais il est question aussi du christianisme et du judaïsme.

L’intolérance au blasphème apparaît dans les livres des trois religions. Richard Malka place cette intolérance dans le contexte historique. Le christianisme et le judaïsme ont évolué avec le temps et, même si ces religions n’apprécient pas le blasphème, il n’est pas question d’infliger la mort ou une quelconque punition de même niveau : torture, … Pareil pour les musulmans modérés. Les islamistes fondamentalistes, par contre, sont restés arrêtés dans le temps.

Représentant Charlie Hebdo il a, bien sûr, soutenu la ligne éditoriale de Charlie Hebdo expliquant, en particulier, que les critiques du journal s’adressaient bien plus aux extrémistes qu’au Prophète lui-même. Par ailleurs, il indique que Charlie Hebdo a publié bien plus de critiques au Christianisme qu’à l’Islam. L’auteur nous explique pourquoi on ne doit pas se laisser faire par les terroristes islamistes et critique l’attitude peut-être un peu trop laxiste en France.

L’auteur, guidé surtout par les ouvrages de Jacqueline Chabbi, a beaucoup étudié le Coran en ce qui concerne le blasphème, la cause des attentats.

Il y a sûrement beaucoup plus à dire mais, s’agissant d’une plaidoirie, il a dit l’essentiel. Des références à la fin de l’ouvrage sont des suggestions pour ceux qui souhaitent aller un peu plus loin.

Citations

(p. 32)

Nous sommes toujours au Pakistan, en février 2022, la foule en colère lapide à mort un malade mental accusé d’avoir brûlé des pages du Coran. Deux mois avant, un directeur d’usine sri-lankais, également accusé de blasphême, était battu à mort et brûle vif par la foule. C’est cela un pays où l’on a l’obligation de respecter les religions.

A propos de la lapidation du malade mental, le représentant du Premier ministre pakistanais, Monsieur Ashrafi, dira, et c’est intéressant : “Tuer des gens en fonction de votre propre interprétation de la religions cela n’est pas de la religion de mon prophète”. Et on France on ne pourrait pas.

(p.53)

L’interprétation, la critique te même l’humour grinçant de Charlie Hebdo, sont une nécessité vitale pour les religions elles-mêmes et surtout pour les hommes.

Pour éviter d’autres Kouachi, d’autres Coulibaly, d’autres femmes incendiées, nous avons besoin de connaissances, d’études, de thèses, de débats et il n’y en a quasiment plus en France, à l’université, aujourd’hui. On ne le permet plus, sous différents prétextes, s’en désole l’islamologue Bernard Rougier. La peur et le silence ont triomphé.

À Charlie Hebdo, on ne s’y résigne pas. La religion est un sujet trop sérieux pour en laisser l’étude aux seuls religieux.

(p. 61)

Nous sommes à La Mecque au VIIème siècle. Mahomet subit des moqueries violentes et des insultes toute sa vie. Il faut se replacer dans le contexte : il prétend être un nouveau prophète. Il y a autour de lui une, deux puis dix personnes. À La Mecque, on se moque de lui et on le rejette. Le Coran lui-même en atteste : on l’a traité de charlatan, de sorcier, d’imposteur, de châtré parce qu’il n’avait pas de fils adulte à ses côtés et les sociétés tribales étaient, dans l’insulte, d’une assez grande imagination, le plus souvent à caractère sexuel.

Autrement dit, à l’échelle de cette société de l’oralité, les caricatures de Charlie Hebdo seraient des piqûres de moustique, d’anodines moqueries. Riss avec ses dessins serait un enfant de chœur. Dans la société d’origine du Prophète, il était impensable de réagir physiquement à une moquerie, sinon tout le monde serait mort.

Quatrième de couverture

Après  Le droit d’emmerder Dieu, éloge du droit au blasphème,  Richard Malka revient sur l’origine profonde d’une guerre millénaire au sein de l’Islam  : la controverse brûlante sur la nature du Coran.
Plus qu’une plaidoirie, ces pages mûries pendant des années  questionnent ce  qu’il est advenu de l’Islam entre le VIIème et le XIème siècle, déchiré entre raison et soumission.
Les radicaux ont gagné,  effectuant un tri dans le Coran et les paroles du Prophète, oppressant leurs ennemis – au premier rang desquels les musulmans modérés, les musiciens, artistes, philosophes, libres penseurs, les femmes et minorités sexuelles.
Plonger avec passion dans cette cassure au sein d’une religion n’est pas être « islamophobe », c’est  regarder l’histoire en face.
Traité sur l’intolérance  est  une méditation puissante, un appel aux islamologues du savoir et de la nuance – pour qu’enfin  chacun sache, comprenne, échange, s’exprime.