Philippe Simonnot – Le brun et le vert
Philippe Simonnot est un économiste et journaliste français décédé en 2022.
Ce livre commence par raconter le début de l’écologie : concept créé par Ernst Haeckel dans les années 1850. Biologiste intéressé par la Théorie de l’évolution de Darwin, c’est le premier écologiste. Ce qui est à retenir de la théorie de Haeckel est, d’une part, l’intérêt par la nature et, d’autre part, un « darwinisme social » où la sélection naturelle s’appliquait aussi à la société et aux races.
L’auteur, dès le début du livre, fait part de son désaccord avec Johann Chapoutot, historien, au sujet du point de vue des nazis sur la nature (voir citation). Je ne suis pas, bien entendu, capable de trancher mais j’ai un point de vue. Leur désaccord est plutôt sur leurs conclusions que sur les faits, et je penche plutôt vers celui de Johann Chapoutot.
Hermann Göring était un adepte de la chasse et a créé des lois pour protéger les forets, des lois qui sont restées valables longtemps après la fin de la guerre. On retrouve le concept de Dawerwald – forêt éternelle – concept assez lié au nazisme puisqu’il fallait éliminer les arbres de « moindre valeur » avec un critère similaire à la race.
D’autres scientifiques ont développé une agriculture biodynamique, un système de production agricole sans intrants de synthèse issu du courant ésotérique et pseudo-scientifique de l’anthroposophie. Ceci n’a pas pu exister que grâce à Himmler qui était adepte du courant ésotérique.
Il faut aussi remarquer que l’idée de « ressources limitées » de la nature n’était pas encore en vogue puisque ce constat n’a pas été considéré sérieusement qu’a partir des années 70 avec le rapport Meadows (The Limits to Growth).
Donc, il me semble que la préoccupation des nazis avec la nature n’a quasiment rien à voir avec celle de nos jours.
Malgré cela, c’est un ouvrage intéressant et je ne connais pas d’autre équivalent (mais peut-être qu’il y en a).
Citations
(p. 178)
« Il est certain qu’un jour viendra où l’humanité, ne pouvant plus faire face aux besoins de sa population croissante par l’augmentation du rendement du sol, devra limiter l’accroissement du nombre des humains. Elle laissera la nature se prononcer, ou bien elle essaiera d’établir elle-même un équilibre : par des moyens plus appropriés que les moyens actuels, espérons-le; mais alors tous les peuples seront touchés, tandis que maintenant seules sont atteintes les races qui n’ont plus assez de force pour s’assurer le sol qui leur est nécessaire en ce monde. Car les choses sont pourtant telles que, à notre époque, il y a encore d’immenses étendues de sol inutilisé, sol qui n’attend que d’être exploité. Et il est sûr aussi que ce sol n’a pas été conservé par la nature comme territoire réservé dans les temps à venir à une nation ou à une race déterminée. Il est certain, au contraire, qu’il est destiné au peuple qui aura la force de le prendre et l’activité nécessaire à son exploitation. […] La nature ne connaît pas de frontières politiques. Elle place des êtres vivants les uns à côté des autres sur le globe terrestre, et contemple le livre jeu de forces. Le plus fort en courage et en activité, enfant de prédilection de la nature, obtiendra le noble droit de vivre. »
L’auteur de Mein Kampf se montre ici en avance sur son temps. A un moment ou à un autre, ose-t-il prévoir, le problème de la surpopulation se posera fatalement. Mais cette question, selon lui, sera résolue par la loi du plus fort.
(p. 194 – Notes)
« la nature prisée par les nazis n’est pas celle des naturalistes et autres écologistes, mais une nature sommairement darwinienne, plus germanisée qu’anthropisée. Elle n’a rien à voir avec l’amour et le respect de la biodiversité. Et de façon concrète, tant sur un plan civil que militaire, les nazis se sont montrés de redoutables destructeurs de la nature, tant sur le plan de l’agriculture que sur celui de l’aménagement du territoire. Il est temps d’en finir avec une approximation inepte », écrit l’historien Johann CHAPOUTOT dans « Nazisme, environnement, écologie », La Pensée écologique 2019/2 (n° 4), pages 26 à 30. Nous pensons tout le contraire, et nous étonnons qu’un historien aussi compétent se livrer à une telle dénégation. Notons que Chapoutot, plus récemment, s’est livré à une intéressante étude sur l’origine nazie du management (Chapoutot, 2020) (voir note *). Un sujet très à la mode dans les années 1970, aujourd’hui moins sensible que l’écologie.
* Il s’agit du livre « Libres d’obéir ».
Quatrième de couverture
C’est une page d’histoire oubliée ou méconnue qu’exhume ici Philippe Simonnot. Celle des liens que, à l’entour des années 1930, le nazisme ascendant a entretenus avec l’écologie émergente.
C’est une page d’histoire oubliée ou méconnue qu’exhume ici Philippe Simonnot. Celle des liens que, à l’entour des années 1930, le nazisme ascendant a entretenus avec l’écologie émergente. Comment expliquer ce rapport troublant ? Quelle conception le Troisième Reich prônait-il de la nature ? Quelles lois édicta-t-il en faveur de l’agriculture, de la création de parcs nationaux, de la protection des forêts ou des animaux ? À quelle représentation de l’environnement se référait-il ?
À travers un examen minutieux des théories et des mesures nazies dans ce domaine, mais aussi à travers un décryptage inédit des thuriféraires de cette tendance, Ernst Haeckl, Walther Schoenichen ou Richard Walther Darré, Philippe Simonnot démêle les fils de toute une généalogie idéologique. L’écologisme dont se revendiquait le nazisme reposait sur l’idéalisation d’une nature sauvage mâtinée de darwinisme social, porteuse d’une exaltation de la force et d’une aspiration païenne à la volonté de puissance. Elle participait en fait de l’antihumanisme fondamental de ce totalitarisme.
Une contribution à l’histoire des idées sur une appropriation qu’il faut connaître pour pouvoir mieux la critiquer et la contester.