Gérard Chazal – Du panoptique de Benthan à la surveillance numérique
Il est probable que beaucoup, comme moi, ont entendu parler de ce fameux panoptique de Bentham grâce à Michel Foucault et son livre « Surveiller et punir ». Ce livre, comme celui de Foucault, commence par parler du panoptique.
Le panoptique est une architecture de prison tel que les prisonniers seraient surveillés sans voir qui les surveillait. Une prison circulaire où le surveillant serait placé au centre. Un bâtiment conçu par un philosophe. Il semblerait que six prisons en France aient été construites selon ce principe et trois continuent encore en service : Niort, Caen et Vaul-de-Reuil. C’est, peut-être, la première fois qu’un outil technique important ait été conçu avec ce but spécifique de surveillance.
Michel Foucault a généralisé l’idée à la plupart des activités de notre société : la surveillance des ouvriers dans les ateliers des usines, dans les écoles, les hôpitaux, aéroports, …
Il est surtout question de surveiller les individus, disons indésirables, en prison et après leur sortie (bracelet électronique, …) et à la fin du livre on parle des formes actuelles de surveillance de tous et par tous. La surveillance de tout ce qu’on fait sur internet (Google, …) et même la surveillance des uns par les autres : des outils des réseaux sociaux qui informent quand untel est connecté, quand il a lu un message, …
Un livre court qui se lit très facilement. On n’apprend pas beaucoup mais ça permet de remettre les idées en place et alerter sur la surveillance qui nous est imposée sans, parfois, nous rendre compte.
Citations
(p.11)
La surveillance implique une société dans laquelle certains éléments doivent être maintenus sous le regard de ceux qui, d’une manière ou d’une autre, se présentent comme les garants de l’ordre social et, à ce titre, les détenteurs du pouvoir. Or ces éléments qu’on a longtemps enfermés ce sont les délinquants, les criminels mais aussi les révoltés, les marginaux de toutes sortes, les prostituées, les vagabonds, mais encore les nomades et les fous et peut-être in fine le citoyen qui s’interroge et proteste. Pendant longtemps on a défendu l’idée qu’il existait une similitude entre le désordre social et le désordre mental et qu’un même remède convenait aux deux. Ainsi, on a longtemps enfermé dans les mêmes lieux les vagabonds, les prostituées et les malades mentaux, et si on nommait ces lieux des hôpitaux ou des asiles plutôt que des prisons, le régime en était très proche. Mais aujourd’hui l’idéal de transparence si souvent mis en avant vise finalement à enfermer toutes les femmes et les hommes sous le regard de l’ordre institué puisqu’il s’agit de remplacer les murs qui ne cernaient que quelques-uns par le regard anonyme de l’2tat posé sur tous.
En effet derrière toutes les formes et tous les moyens de surveillance que nous allons parcourir, il y a le regard. « Le regard est l’instrument du pouvoir », écrit Michelle Perrot dans Les ombres de l’histoire alors qu’elle se penche en historienne sur la question des prisons – l’œil du pouvoir dira par ailleurs Michel Foucault. Dès lors étudier les formes de la surveillance dans le cours de l’histoire, c’est plus ou moins explorer les frontières d’un regard, celui du pouvoir qui garant un ordre politique et social, les structures de sa puissance de contrôle mais aussi les parts d’impuissance, ses dérives et ses abus.
Quatrième de couverture
La surveillance des individus soupçonnés d’être dangereux semble être l’objectif que se sont fixé, pour se défendre, nos sociétés. À la fin du XVIIIè siècle le philosophe anglais Bentham imagine une prison circulaire où les prisonniers sont constamment surveillés par un gardien placé en son centre. Mais, après leur éventuelle libération, comment prévenir la récidive ? Sont convoqués la photographie, la fiche anthropométrique puis le bracelet électronique, mais aussi de nouveaux moyens numériques – localisation des téléphones, caméras de surveillance, logiciels de reconnaissance faciale… On verra ici comment la surveillance s’est étendue à l’ensemble de la population, justifiant l’évocation par certains du tristement célèbre Big Brother qu’imagina Georges Orwell dans 1984.