Patrick Weil – De la laïcité en France

C’est un petit livre intéressant qui est allé au delà de mes attentes.

Il raconte l’historique de la laïcité en France, depuis la fin du XIXème et surtout la loi de 1905, référence temporelle.

Au contraire de ce qu’on a l’habitude de penser, cette loi résulte du mot “Liberté” dans la triade “Liberté, Égalité, Fraternité”. C’est le droit de choisir sa religion sans aucune pression et de s’exprimer en public sans aucune contrainte.

La première conséquence a été la séparation de l’État et de l’Église qui tenait une grande influence sur le premier : les églises, les salaires des prêtres, évêques, … mais surtout dans le programme d’enseignement dans les écoles. Tout ceci a généré des énormes conflits avec le Vatican et a nécessité des ajustements et des concessions tout en gardant l’idée originale.

La séparation entre l’État et les cultes est la condition sine quoi non de la laïcité.

Le livre retrace l’histoire de la laïcité depuis cette loi, avec l’impact des événements majeurs du siècle : les deux grandes guerres et même des anecdotes mineures telles les heures où les églises étaient autorisées à sonner leurs cloches…

Des points de conflits récents ne sont pas oubliés : les lieux de culte, la liberté d’expression et de critique (blasphème, …) ou encore le port du voile sans oublier les sectes.

On parle des sectes puisqu’elles supposent une emprise psychologique des membres. Sans oublier les cas où elles ont généré des suicides collectifs.

Au sujet du port du voile, il est intéressant de noter que la loi de 1905 permet le port de signes distinctifs dès qu’il n’est pas trop ostentatoire et ne perturbe pas l’ordre public. Le voile serait, en principe, permis mais vu les pression subies par certaines femmes, la loi et la justice ont fini par trancher par l’interdiction dans certains endroits.

Dans la partie liberté d’expression et de critique, le point important rappelé par l’auteur est que la loi protège les “croyants” et pas les “croyances”. Bien sûr que toute critique excessive portant préjudice à l’ordre publique au delà du raisonnable est critiquable.

L’auteur nous prouve que la genèse de cette loi a été très bien réfléchie et la preuve est qu’elle garde son essence jusqu’à nos jours.

Bref, un petit livre d’une centaine de pages très dense et bien écrit. À lire par ceux qui s’intéressent au sujet ou souhaitent l’expliquer à des proches ou à ses enfants.

Citations

(p. 62-63)

Aujourd’hui, l’enseignement catholique sous contrat scolarise 17 % de la population scolaire française, soit près de 2.100.000 élèves de conviction diverses : 97 % des établissements privés sont catholiques. Mais ce succès n’a plus de rapport avec une activité religieuse.

Au milieu des années 1970, la pratique de la religion catholique s’est affaissée. Lez nombre des Français qui se confessent au moins une fois par mois passe de 15% en 1952 à 1% en 1974. En 1977, 33% des jeunes de 15 à 29 ans déclarent ne pas croire en Dieu contre seulement 17% en 1969.

Pour beaucoup, c’est le signe que la religion est vouée à disparaître. L’athéisme et l’agnosticisme continuent de progresser. Mais la sécularisation prend soudain un chemin de traverse. Se développent des formes alternatives de croyances et de vie religieuse, parfois dénommées sectes. Au même moment, l’immigration venue de la France coloniale s’installe en métropole, faisant de l’Islam la deuxième religion de France.4

En 2021, les croyants seraient en France 37%, les non-croyants 31%, 15% sont agnostiques, 10% indifférents. Entre 48 et 57% se sentent liés au catholicisme, entre 3 et 7% à l’islam, 3% au protestantisme, 2% au bouddhisme, 1% au judaïsme, 1% à l’orthodoxie. “Une partie de la population, croissante, s’éloigne du religieux, quand l’autre réactive ses appartenances”, résume Philippe Portier.

Quatrième de couverture

Il n’y a pas si longtemps, la laïcité allait de soi, unissait tous les Français, et nous distinguait des autres.

Voilà qu’aujourd’hui elle nous divise.

Dans ce court et vigoureux essai pédagogique, Patrick Weil repart du passé pour réparer le présent et préparer l’avenir. Car l’histoire de la loi de 1905, matrice juridique de la laïcité, fournit en réalité toutes les armes pour apaiser les querelles d’une France en guerre avec elle-même.

Ceux qui cherchent une boussole pour la pratique de la laïcité dans des situations précises trouveront ici une réponse informée et raisonnable ; ceux qui veulent en expliquer la notion à leurs enfants, amis, collègues, comprendront à la fois sa genèse et sa force : garantie de la liberté et de l’égalité des citoyens dans leurs options spirituelles, elle demeure la clé de voûte de notre République.