Sebastien Bohler, « Le bug humain »

De la manipulation psychologique par la peur !

Celui qui parvient à contrôler la peur de l’autre devient le maître de son âme.
Machiavel

Ceci n’est pas un livre de vulgarisation scientifique mais plutôt de la militance politico-écologique avec une tentative de manipulation psychologique, comme j’explique dans ce texte. Et c’est surtout ça qui me dérange.

Le contenu scientifique de ce livre est contesté par au moins deux chercheurs en neurosciences en activité : Jérémie Naudé 1 (chercheur au CNRS – Université Pierre et Marie Curie) et Thibauld Gardette  2. On peut aussi consulter la page wikipedia de Sébastien Bohler 3 (vu le 10 janvier 2021), on trouve une critique négative sur ce livre.

Sébastien Bohler a abandonné le monde de la recherche pour devenir journaliste aussitôt il a fini sa thèse, en 2001, il y a 20 ans.

Si vous souhaitez apprendre un peu plus sur cette pulsion de consommation que nous avons tous, je vous conseille vivement le livre Comment échapper à la dictature du cerveau reptilien  de Didier Pleux, psychologue clinicien. Ce livre parle de cette pulsion dans un cadre général et pas juste de l’impacte écologique, qui reste quand même un impact indirecte.

Pourquoi Sébastien Bohler affiche ses émotions dans son livre ?

La science et le journalisme sont des domaines où l’objectivité est une qualité et le manque un défaut. Il est étonnant de voir apparaître ses émotions (subjectives) dans le texte.

Dans le cas de ce livre c’est une situation, connue en psychologie, dans laquelle quelqu’un transmet (ou essaye de transmettre) ses émotions (sincères ou pas) à autrui. C’est normal et très bien, mais plutôt pour une oeuvre littéraire (romain, …). J’ai des doutes sur la sincérité de ses émotions.

J’en cite trois exemples :

Page 10 – La découverte terrifiante :

Pour répondre à cette question, je me suis penché sur la partie la plus intime et la moins visible de ce qui fait notre humanité. Ce qui nous échappe, blotti au fond de notre boîte crânienne, si obscur et si caché, mais qui nous gouverne. Notre cerveau.

Ce que j’ai découvert m’a glacé. Ce cerveau ...

Pages 11 à 14 – La perte : La maison secondaire achetée par son père, à l’Île de Yeu, quand il avait 17 ans. Les moments heureux à son adolescence et adulte avec ses enfants. La disparition annoncée, de cet endroit tant aimé, suite à la montée des eaux des océans – le réchauffement climatique.

Mes enfants ont grandi en partie à cet endroit, et s’y sont attachés comme je l’ai fait avant eux. Mais ils ne pourront probablement plus faire de même avec les leurs. C’est cette leçon qu’il faut commencer à leur inculquer.

Perdre un lieu que l’on aime est difficile, …

Pages 139 et 140 – La tartine du petit déjeuner :

  • le danger annoncé :

Le 14 novembre 2017, au moment de croquer dans une tartine de pain grillé, j’allume la radio et j’entends le flash d’informations suivant :

 » Quinze mille scientifiques viennent de lancer une pétition, à la veille du sommet pour la blanète de Bonn, pour tirer une sonnete d’alarme. Nos émissions de CO2 n’en finissent pas d’augmenter… »

  • et le coup de colère – l’indignation à peine voilée contre le coupable, le capitalisme qui, d’une part, crée des emplois et, d’autre part, sert à fabriquer des avions qui brûleront des combustibles fossiles qui participeront au réchauffement climatique…

Je termine ma tartine. Une journée se passe, et le lendemain matin, je me retrouve à faire à peu près les mêmes gestes… et j’entends à la radio :

« Airbus vient de décrocher un contrat de cinquante milliards de dollars pour quatre cent trente moyen courriers. C’est une très bonne nouvelle. »

Je repose ma tartine. Je dois avoir mal entendu.

… Comment les mêmes personnes, les mêmes journalistes, les mêmes directeurs de programmes journalistes, les mêmes directeurs de programmes radio, peuvent-ils, jour après jour, rédiger coup sur coup des communiqués aussi incohérents que la mauvaise nouvelle du réchauffement climatique et la bonne nouvelle d’un contrat industriel qui va accentuer ce même processus ? … On marche sur la tête !

Où est le rapport – direct – entre le striatum et l’écologie ?

Je me suis demandé quel est le vrai intérêt de parler d’écologie dans ce livre.

Sauf un tout petit nombre de psychopathes, ou des méchants dans les films de James Bond, personne a l’intention de détruire la nature.

Si on suppose que le contenu de son livre sur le striatum est vrai, ce n’est qu’indirectement que le comportement humain pourrait porter atteinte à la nature et la détruire. Au même titre qu’un tas d’autres dommages qui n’ont rien à voir avec la nature : les conflits de tout genre (entre personnes, communautés, pays, …), les jeux de toute sorte, …

Alors, disons le clairement, le sujet principal du livre n’est pas le striatum ou le fonctionnement du cerveau, mais un militantisme écologique.

Et cela semble apparaître dès la couverture du livre :

Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la nature et comment l’en empêcher ?

La réponse est dans une émission « Arrêt sur Images » :

Arrêt sur images. Emission du 28 juin 2019 : Effondrement : « Les éco-anxieux sont des gens normaux dans un monde malade » 4

Sur le site de « Arrêt sur images », on peut trouver la vidéo de l’émission, ainsi que la traduction en mode texte. La partie intéressante est la conclusion, à la fin de l’émission :

Ce sont ces trois interventions qui m’ont mis mis la « puce derrière l’oreille » :

  • Sébastien Bohler démontre bien connaître le mécanisme de la peur, en particulier le pré-requis indispensable pour que ça marche : « La peur peut fonctionner si un moyen d’action donné en même temps, sinon c’est même le contraire qui peut se passer »;
  • Dr. Desbiolles dit que « la peur est nécessaire et c’est ce qui nous a maintenu en vie pendant des millénaires ». Oui, sauf qu’il s’agit d’une peur naturelle par le fait que nous ne connaissons pas l’avenir. Ça n’a rien à voir avec une peur inculquée intentionnellement à une population dans le but d’atteindre un objectif, soit-il valable ou pas.
  • Cécile Duflot (militante dite écologiste, mais plutôt anticapitaliste) valide et estime nécessaire la démarche de faire peur pour atteindre cet objectif : « Est-ce qu’il faut faire peur parce qu’il y a un risque ? Oui. »

Mais quel est le problème avec ça ? Il y en a deux : la manipulation psychologique et une démarche déloyale avec les autres tendances écologiques.

Pour la manipulation psychologique, Sebastien Bohler sait ce qu’il fait : Il crée un discours de danger et rajoute un moyen d’action : le contrôle du striatum : la pulsion de consommation . C’est fait avec prémeditation.

Quelqu’un qui est en situation de peur n’arrive pas à réfléchir et à prendre des décisions par lui même. C’est pour cela que, pour que ça marche, il faut lui donner un moyen d’action de façon à ce qu’il fasse ce que le manipulateur souhaite et pas la première chose qui peut venir à la tête du manipulé.

C’est une façon de créer une « foule psychologique », sujet traité par Gustave Le Bon déjà en 1895 5.

Cette démarche a été mise en oeuvre par les personnes les moins recommandables de l’histoire tels Joseph Goebbels. L’exemple le plus caractéristique est son discours en 19436, lorsque le risque de l’Allemagne perdre la guerre devenait réel. Il en parlait dans son discours et présentait comme moyen d’action : lutter jusqu’au bout. Les berlinois ont suivi ses conseils et la prise de Berlin a fini avec 100 mille morts.

Je précise que je ne mets pas dans le même plan les objectifs de l’écologie et des nazis. Néanmoins je constate simplement que je me trouve devant le même genre de méthode.

Non, Sébastien Bohler et Cécile Duflot, la fin ne justifie pas les moyens.

Pour la démarche déloyale… dans Luc Ferry, “Les sept écologies” on voit que les écologiques sont multiples. Alors, je ne vois pas de raison pour qu’un groupe s’estime dans le droit de mettre en route une démarche de ce genre pour imposer leur point de vue. Dans un état démocratique, ça doit se passer par le dialogue et pas par des choses de ce genre.

L’écologie est un sujet très sérieux et j’ai l’impression que le but de Cécile Duflot et Sébastien Bohler relève plutôt d’un militantisme anticapitalisme déguisé en objectif écologique que d’une vraie démarche de protection de la nature.

La suite, son nouveau livre « Où est le Sens ? »

La suite d’une « saga neuro-écologique : apologie de l’apocalypse » ?

La même logique : la peur et un moyen d’action.

Dans la quatrième de couverture :

Notre monde est au bord de l’asphyxie. Les espèces vivantes s’éteignent, les calottes glaciaires se liquéfient, les eaux montent, la température grimpe. Demain, nous serons exposés à des pénuries, à des migrations climatiques, et devrons lutter contre de nouvelles pandémies.
Sommes-nous à ce point impuissants et résignés à périr ?
Certainement pas !
Une ressource insoupçonnée se trouve enfouie dans notre propre cerveau. …



Quatrième de couverture de « Le bug humain »

L’humanité détient une arme secrète : son cerveau. Longtemps notre meilleur allié, notre cerveau risque aujourd’hui de causer notre perte. Car il existe un défaut de conception, un véritable bug, au coeur de cet organe extraordinaire : les neurones en charge d’assurer notre survie ne sont jamais rassasiés et réclament toujours plus de nourriture, de sexe et de pouvoir. Comment se fait-il que, ayant conscience de ce danger, nous ne parvenions pas à réagir ? Peut-on résoudre ce bug et redevenir maîtres de notre destin ? Oui, à condition d’analyser en chacun de nous ce mécanisme infernal qui pousse notre cerveau à en demander toujours plus !

  1. Jérémie Naudé : Les problèmes avec la théorie du « bug humain », selon laquelle nos problème d’écologie viendraient d’un bout de cerveau, le striatum []
  2. La faute à notre cerveau, vraiment ? Les erreurs du Bug humain de S. Bohler []
  3. Sébastien Bohler – Wikipédia – vu le 11/01/2021 []
  4. Effondrement : « Les éco-anxieux sont des gens normaux dans un monde malade » – Vu le 11-Jan-2021 []
  5. Le Bon, Gustave – Psychologie des foules. 9e édition “Quadrige.” Paris: PUF, 2013 []
  6. Joseph Goebbels – Discours du Sportpalast, le 18 février 1943 au palais des sports de Berlin []