Gustave Le Bon, “Psychologie des foules”

Un bouquin publié il y a plus de 100 ans : 1895 plus exactement. Quel intérêt de le lire encore ?

Gustave le Bon décrit ce qu’il appelle “foules psychologiques”, ce sont des groupes de personnes mus par un même objectif, une même idée, une même idéologie.

Il les classe en “foules” homogènes ou hétérogènes (sectes politiques ou religieuses, parfois les thèmes identitaires, castes et classes) et les décrit comme elles se forment et comme peuvent devenir vulnérables à des meneurs suffisamment intelligents (lire plutôt démagogues).

Dans ces foules il y a une espèce de “conscience” collective qui se forme capable de dominer la “conscience” individuelle. C’est bien ça qui caractérise ces “foules psychologiques”. Être intelligent et cultivé ne suffit pas à échapper à cette domination lorsqu’une de ces foules est menée par bon meneur, capables d’empêcher les individus de penser par eux mêmes.. En cela, je ne peux m’empêcher de penser au livre Apocalypse cognitive de Gérald Bronner.

Dans ces foules, les dangereuses ou maléfiques, il y a toujours de PhDs : dans les nazis, dans Daech, dans les partis politiques extrémistes aussi bien de droite comme de gauche. Dans les universités, on voit des professeurs bardés de diplômes et de la reconnaissance internationale soutenir des utopies, dystopies et même du complotisme : leur aura suffit pour attirer des naïfs. La lecture de ce livre permet d’avoir un regard assez intéressant dans les adeptes des partis politiques dont les dirigeants sont des populistes ou démagogues.

Le fond de ce livre reste d’actualité, même si d’autres développements de recherche plus récents ont étendu la connaissance des regroupements de tout genre.

Comme retombées, ce livre a largement inspiré Sigmund Freud dans son livre “Psychologie des Foules et Analyse du Moi” à tel point qu’il est, dans certaines éditions, mis en annexe du livre de Freud. Ce livre a aussi inspiré l’écriture du livre “Propaganda” de Edward Bernays (neveu de Freud) qui, à son tour, inspiré un certain Joseph Goebbels et les techniques modernes de marketing. Voila pourquoi comprendre le sujet est important.

Il y a une controverse au sujet de ce livre. Certains disent que ce livre serait, en fait, le plagiat d’articles de recherche de deux italiens spécialistes du droit : Scipio Sighele (La foule criminelle) et Gabriel Tarde, publiés peu avant. Mon opinion personnelle, puisque j’ai fait un peu de recherche sur cette possibilité, est que, vue l’ensemble de l’oeuvre de Gustave le Bon, même s’il a plagié ce contenu, il a suffisamment maîtrisé le sujet au point d’écrire un livre ayant servi de point de départ à des recherches d’un psychiatre renommé (Sigmund Freud) et dont le contenu résiste au temps. Et même si on ne pense pas bien de l’auteur, le contenu toujours d’actualité mérite la lecture et vaut plus que la controverse.

Quatrième de couverture

Les idées exposées dans cet ouvrage, publié en 1895, semblèrent alors fort paradoxales. Ce texte est devenu un classique, traduit dans de nombreuses langues, dont la lecture et l’étude sont toujours d’actualité et font partie de la formation de toutes les nouvelles générations de jeunes sociologues.