Marie-France Hirigoyen – Le Harcèlement moral

C’est un des meilleurs livres que j’ai lu sur ce sujet : harcèlement moral et, en fait, les pervers narcissiques.

Ce livre, publié en 1998 et toujours en vente est encore une référence, puisqu’il décrit assez bien ces personnalités.

Au contraire de la notion générique de narcissisme où le personnage a besoin de se sentir admiré par tous par ses qualités supposées, le pervers narcissique s’attaque à une victime particulière et fini par la détruire psychologiquement ou, parfois, même physiquement.

La description de cette pathologie a été introduite par Paul-Claude Racamier, un psychanalyste, en 1992. Les écrits de Racamier sont assez pénibles à lire, pour le commun des mortels que je suis, puisqu’il est toujours question du vocabulaire et les théories psychanalytique.

Le pervers narcissique n’a pas tellement cette envie d’être admiré mais surtout d’anéantir sa victime grâce à un harcèlement permanent, démontrant que l’autre est inférieur, fait toujours tout de travers, … Il y a, en effet, deux phases : celle de l’emprise, ou de séduction suivi d’une phase où l’agression psychologique va anéantir la victime.

L’auteur commence par présenter et commenter une série de scénarios de harcèlement moral, dans un couple, en entreprise et en famille. Puis elle présente les participants – la victime et l’agresseur – avec les personnalités typiques de chacun, et les troubles associés, surtout pour les agresseurs. Puis une partie avec les conséquences, à court et à long terme, de cette relation prédatrice.

La dernière partie est la solution. La première difficulté est que cette relation prédatrice est difficilement perçue par l’entourage et la victime ne peut compter que sur elle même pour se rendre compte, ça arrive. Ensuite, la seule solution immédiate est l’éloignement de l’agresseur puisqu’il se considère avoir toujours raison.

Après ce éloignement il y a, la plupart du temps, besoin d’une thérapie, pour la victime. L’agresseur est, de toutes les façons quasiment incurable, puisqu’il n’accepte jamais se remettre en cause. L’auteur, dans un dernier chapitre, fait le tour des possibles thérapies, ses avantages et ses inconvénients. C’est très intéressant.

On peut se poser la question du besoin de mise à jour de ce livre, écrit il y a plus de 25 ans. Même s’il reste assez d’actualité, on voit quelques indices, comme les références au DSM-IV (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) alors que la version actuelle est le DSM-V, publié en 2013.

Ce livre, que l’on trouve dans les rayons « psychologie » est très accessible et s’adresse aussi bien aux lecteurs lambda qu’aux professionnels.

Citations

(p.151)

Le psychanalyste P.-C. Racamier est un des premiers à avoir élaboré le concept de pervers narcissique. D’autres auteurs, dont Alberto Eiguer, ont ensuite tenté d’en donner une définition : « Les individus pervers narcissiques sont ceux qui, sous l’influence de leur soi grandiose, essaient de créer un lien avec un deuxième individu, en s’attaquant tout particulièrement à l’intégrité narcissique de l’autre afin de le désarmer. Ils s’attaquent aussi à l’amour de soi, à la confiance en soi, à l’autoestime et à la croyance en soi de l’autre. En même temps, ils cherchent, d’une certaine manière, à faire croire que le lien de dépendance de l’autre envers eux est irremplaçable et que c’est l’autre qui le sollicite. »

Les pervers narcissiques sont considérés comme des psychotiques sans symptômes, qui trouvent leur équilibre en déchargeant sur un autre la douleur qu’ils ne ressentent pas et les contradictions internes qu’ils refusent de percevoir. Ils « ne font pas exprès » de faire mal parce qu’ils ne savent pas faire autrement pour exister. Ils ont eux-mêmes été blessés dans leur enfance et essaient de se maintenir ainsi en vie. Ce transfert de douleur leur permet de se valoriser au dépens d’autrui.

(p.196)

Soumises à une emprise trop forte ou trop ancienne, certaines personnes ne sont capables ni de fuir ni de combattre. Elles vont parfois consulter un psychiatre ou un psychothérapeute, mais annoncent d’emblée qu’elles refusent toute remise en question fondamentale. Elles veulent seulement « tenir le coup », supporter leur situation d’asservissement sans trop de symptômes et continuer à faire bonne figure. Ces personnes préfèrent habituellement un traitement médicamenteux plutôt qu’une psychothérapie longue. Cependant, les états dépressifs se succédant, il peut y avoir un abus de médicaments anxiolytiques ou de substances toxiques, et le psychiatre sera amené à proposer de nouveau une psychothérapie. Lorsque le processus de harcèlement est en place, en effet, il est rare qu’il cesse autrement que par le départ de la victime, et ce ne sont pas des médicaments qui permettront à celle-ci de sauver sa peau.

Quatrième de couverture

Un mot peut tuer !

Pour déstabiliser et détruire, les armes de la malveillance, de la manipulation et de la persécution sont innombrables. La perversité ordinaire d’un conjoint, d’un parent, d’un supérieur peut briser un couple, défaire une vie, ruiner une carrière professionnelle. La loi du plus fort règne le plus souvent dans la famille, l’entreprise, la société. L’agresseur mène patiemment son œuvre paralysante et meurtrière. Sa victime se laisse peu à peu enfermer dans le piège prévu pour son supplice.

Comment comprendre, analyser, vaincre le harcèlement psychologique ? Quelles solutions, quelles parades y opposer ?